Tout le monde, ou presque, affiche aujourd’hui une adhésion au changement.
On voit fleurir, dans nos entreprises, les aphorismes qui fleurent bon l’incantation « seul le changement est permanent ».
Parfois, les discours sont un peu plus anxiogènes et guerriers « changer ou mourir ».
Nous sommes toutes et tous pour le changement, cela va sans dire.
Et si l’on voulait être totalement honnête, voire sarcastique, on dirait surtout chez les autres et pour les autres.
Quel que soit le périmètre du changement considéré, professionnel, personnel, individuel, collectif le changement est tout sauf facile.
Alors quelles sont les causes de cette situation ?
Et que faire pour y remédier ?
1.
L’inconfort partie intégrante du changement
Personne n’aime l’inconfort et encore moins l’insécurité.
Mauvaise pioche, tout changement engendre, par nature ces deux conséquences. Au moins au début.
Beaucoup de tentatives de transformation échouent pour une première raison essentielle :
- La phase intermédiaire est mal évaluée dans sa durée et sous-estimée dans son intensité à générer de l’inconfort et de l’insécurité.
La caractéristique de toute évolution est la phase intermédiaire. Pour aller d’un état actuel vers l’objectif choisi on emprunte un itinéraire qui est en fait une phase de déséquilibre.
On quitte, une zone où les repères sont bien établis pour aller vers un ailleurs qui sera peut-être meilleur mais en attendant le passage d’un état à l’autre fait voler en éclats nos équilibres et engendre une forme de chaos.
Ce point a été résumé, pour les particuliers, quitter sa zone de confort. Cette zone de confort existe également pour les organisations.
C’est une phase que j’appelle d’inconfort dans tous les sens du terme. Chacun perd ses acquis, ses habitudes, ses automatismes, ses avantages. C’est donc douloureux, même notre corps n’aime pas être projeté dans un environnement inconnu.
L’émotion principale engendrée par tout changement ou toute sortie de cette zone de confort est l’insécurité. C’est ce sentiment qui domine et est source de blocages.
Donc il ne faut pas s’étonner que des résistances se manifestent. C’est une réaction que l’on pourrait qualifier de naturelle et normale. Nous voulons très fortement retourner dans notre zone de sécurité.
Souvent dans les projets de changement que ce soit des organisations ou individus cette phase est sous-estimée dans ces conséquences douloureuses, pénibles, dans sa durée et son intensité des efforts à déployer.
Là où il y a une volonté il y a un chemin ; certes, mais tout ceci doit se préparer et s’anticiper. Le volontarisme incantatoire n’est d’aucun effet et n’aide pas à l’atteinte du résultat souhaité, au contraire.
Personne n’aime annoncer de mauvaises nouvelles.
Vous imaginez l’accueil qui serait fait à un leader qui à la façon d’un Churchill expliquerait que nous n’avons pour perspectives que des larmes et du sang…
Or si nous changions d’approche et considérions que l’inconfort fait partie du processus ?
Et qu’il doit être géré, pris en compte, comme une partie essentielle du processus de réussite.
Malheureusement cette dimension est aujourd’hui souvent ignorée. Pire toute personne qui oserait lever la main afin d’évoquer l’inconfort provoqué par un projet en cours serait immédiatement taxée d’opposant au projet, de résistant au changement… bref un mauvais sujet dont il faudrait se débarrasser au plus vite.
Tout projet de changement doit comporter un volet accompagnement au changement. Dont la finalité est d’inventorier les déséquilibres qu’il va engendrer à tous les niveaux organisationnels, humains et y apporter des solutions.
A défaut la résistance au changement qui se manifestera sera proportionnelle à l’ignorance de ce point.
Au niveau individuel que nous souhaitions apprendre une nouvelle langue, nous mettre au sport, perdre du poids, changer de métier… nous devons cesser de nous focaliser sur le résultat rêvé et d’abord prévoir les difficultés pour les appréhender et les intégrer dans notre plan d’action personnel.
Ainsi aucune surprise ni démotivation ne seront au rendez.
L’inconfort doit être considéré comme faisant partie du changement.
2.
La bonne communication sur le changement
Le faire aimer malgré ses défauts
Personne n’aime annoncer de mauvaises nouvelles !
J’ai toujours trouvé que dans les entreprises il y avait une fâcheuse tendance à vouloir communiquer positif à tout prix.
Comme si travestir la réalité pouvait être considéré comme positif. Ou encore utile pour que les acteurs du changement mobilisent le bon niveau d’énergie et d’implication sur la durée.
Non le mensonge « d’état » aboutit au résultat contraire à tous les coups.
Et pourtant avant d’entamer tout changement il convient de cesser de vendre le rêve d’un futur meilleur, ou parfois l’unique alternative que nous ayons. (C’est ça ou la fin).
J’ai connu, comme beaucoup, des plans de modifications du système informatique qui devait nous aider à mieux travailler, et qui se sont avérés des catastrophes.
En repensant aux communications de l’époque, seuls les avantages futurs étaient présentés et encore de manière totalement idéalisée et les inconvénients totalement occultés, les difficultés transitoires soigneusement évités.
Si le mot leader a un sens et si leur utilité doit être prouvée c’est à l’occasion des grands changements qu’ils doivent montrer l’étendue de leur talent.
Ils doivent, non seulement communiquer sur le futur et faire partager leur vision. Mais également travailler pour accompagner et reconnaître les difficultés et obstacles de la période transitoire.
C’est le rôle du leader de faire souhaiter le changement.
On dit partager une vision pas partager une hallucination.
Il convient d’avoir une communication transparente et factuelle qui explique bien et reconnaît les efforts demandés.
Voilà les points essentiels d’une bonne gestion du changement qu’il soit collectif ou personnel.
- La période intermédiaire sera inconfortable
- Elle durera x temps
- Elle nécessitera tel et tel « sacrifices »
- Nous reconnaissons l’inconfort, nous le nommons précisément et voilà notre proposition afin de le gérer, l’atténuer, vous accompagner.
- Le résultat final, lui aussi doit être présenté de manière réaliste. A force de vendre du rêve plus personne ne croit en l’utilité des sacrifices préalables à consentir.
Une citation de Marc Aurèle dans ses pensées pour moi-même me revient à l’esprit.
« Ne souhaite pas que ce que tu veux arrive ;
Veux qu’il arrive comme il arrive »
Je fais partie de ceux qui pensent que les individus et les collectivités ont un niveau de résilience très élevé. Une capacité de travailler en collectif très fort.
Malheureusement, ceux qui les dirigent n’ont pas toujours, la communication à la hauteur des enjeux. Souvent par une appréciation erronée de ce qu’il convient de dire, comment et quand.
Pour les particuliers qui veulent voir un changement en eux ils doivent accueillir et accepter la réalité de la contrepartie à payer afin d’atteindre leur objectif.
Il suffira de considérer que l’inconfort existera et sera un élément clé du succès à venir. Inutile de se mentir.
3.
Préférer au futur espéré
Un quotidien réussi
Le dernier obstacle à la réussite dans tout changement et le poids trop lourd donné au résultat final.
Parfois entre le résultat attendu et la situation présente l’écart est élevé, le temps nécessaire à la réalisation du changement éloigné.
Tous les ingrédients pour une démotivation en cours de route sont réunis.
Et c’est là où nous devons faire preuve d’esprit tactique. Transformer cet objectif ambitieux en étapes réalistes, atteignables, ramenée à une dimension humaine qui est quotidienne.
Chaque tache, chaque jour devient un objectif en soi. Sa réussite conditionne le résultat final mais chaque réussite quotidienne doit être appréciée comme l’atteinte d’un résultat en soi.
Il est important de maintenir la motivation tout au long du processus.
4.
Changer d’état d’esprit
Si nos pensées et nos croyances façonnent nos existences. Il est rationnel de penser que nos pensées et nos croyances nous ont amené dans l’état où nous sommes aujourd’hui.
Ce constat est vrai pour les individus comme pour les organisations.
Pour changer nous devons changer de mindset comme disent nos amis anglo-saxons. D’état d’esprit.
Avant d’entamer tout changement il convient également de se poser la question des pensées, de l’état d’esprit qui va avec le changement.
Que devons-nous faire évoluer afin d’avoir l’état d’esprit de pensée qui va avec le changement désiré ?
C’est peut-être la partie la plus difficile à appréhender dans un accompagnement au changement. Comment penser pouvoir faire réussir un projet si les personnes que l’on souhaite embarquer sont contentes dans l’état actuel ?
Cette remarque est vraie des organisations comme des individus.
Pour beaucoup de personnes leur manière de pensée, leurs croyances, font partie de leur identité. Embrasser le futur, l’évolution, le changement n’est pas uniquement une démarche intellectuelle. Tout le monde peut comprendre la nécessité de changer.
De la compréhension à l’intégration il y a une étape cruciale qui est celle d’adopter l’état d’esprit qui va avec le changement.
Conclusion
S’adapter ne signifie pas toujours exactement changer. L’adaptation provient d’une pression externe qui nous oblige à bouger. C’est du changement mais contraint.
Certains fumeurs invétérés arrêtent du jour au lendemain car leur médecin leur explique qu’ils viennent d’attraper une mauvaise maladie et que le choix est clair.
C’est de l’adaptation sous contrainte. Souvent il est déjà presque trop tard.
Le changement est une démarche volontaire, réfléchie. Nous sommes dans l’anticipation.
Quand on manifeste une ambition et que l’on veut voir un changement se réaliser dans nos vies ; nous sommes dans le changement.
Ce qui caractérise notre époque et la rapidité de l’évolution du contexte dans lequel nous évoluons. Le changement devient réellement une deuxième nature.
Autant comprendre les ressorts complexes qui permettent de se donner un maximum de chances de réussir.